Suite à l’exécution de sang froid d’un jeune de 25 ans pour avoir voulu esquiver un contrôle alors qu’il n’avait pas son masque, les autorités albanaises ont réprimé les manifestants qui ont pris la rue plusieurs jours de suite.
Klodian Rasha, 25 ans, a été tué mardi par un policier qui lui a tiré dessus avec son arme de service. Un « usage excessif de la force » a vite reconnu sa hiérarchie. Le ministre de l’Intérieur a démissionné, mais les manifestations se poursuivent pour le troisième jour consécutif. Des scènes d’émeute ont éclaté à Tirana.
Mise à jour 11 décembre, 22h30 : Des milliers de personnes ont manifesté ce vendredi dans les rues de Tirana, Durrës et Fier, pour la troisième journée consécutive depuis la mort de Klodjan Rasha, abattu mardi par un policier.
Alors que des centaines de personnes se rassemblaient aux abord du siège du gouvernement à Tirana, les autorités ont déployé des véhicules blindés, des canons à eau et d’importantes forces de police. Sous les tirs de lacrymogènes, la foule scandait « A bas la dictature, Rama, casse-toi ! »
Le Premier ministre Edi Rama a menacé de prison les manifestants qui se livreraient à des actes de « vandalisme », tout en accusant l’opposition et le Président Ilir Meta de les y pousser. « L’opposition et le président ne sont pas seulement les instigateurs, mais aussi les orchestrateurs de la violence qui insulte la mémoire de Klodian », a écrit Edi Rama, ajoutant que les chefs de l’opposition, Lulzim Basha et Monika Kryemadhi, essayaient « désespérément » d’utiliser l’incident à des fins politiques.
Après la démission, jeudi, du ministre de l’Intérieur, Sander Lleshaj, les manifestants réclament le limogeage du directeur général de la police, Ardi Veliu.
62 personnes ont été interpelées mercredi et jeudi, 116 ont été accusées d’avoir pris part à une manifestation illégale en temps de pandémie, tandis que les autorités affirmes que 21 policiers et quatre manifestants ont été blessés.
La situation est tendue à Tirana depuis la mort mardi, au petit matin, de Klodjan Rasha, tué par un policier dans son quartier de Lapraka. Selon la version officielle, le jeune homme de 25 ans aurait refusé d’obtempérer aux injonctions de la police qui voulait le contrôler. Le jeune homme ne respectait vraisemblablement pas le couvre-feu imposé dans la capitale pour endiguer l »épidémie de coronavirus. Dans sa première version, la police a parlé d’un « homme armé », avant de se rétracter.
Une manifestation a rassemblé plusieurs centaines de personnes dans la soirée de mercredi. L’invitation s’était propagée dans la journée sur les réseaux sociaux, pour réclamer après cette bavure la démission du ministre Sander Lleshaj. Le rassemblement s’est vite déplacé du ministère de l’Intérieur au bâtiment du Premier ministre. C’est là que des échauffourées ont éclaté avec les forces de l’ordre.
Le bilan des autorités fait état de neuf policiers et deux manifestants blessés. Quatre individus ont été interpellés et la police recherche d’autres personnes, suspectées d’avoir commis des violences. En raison de la crise sanitaire, tout rassemblement est interdit en Albanie. Mais cela n’a pas empêché d’autres défilés à Shkodër, Durrës ou Bulqizë.
Le policier responsable du tir mortel a été arrêté et il est sous le coup d’une inculpation pour « meurtre ». Ancien général, le ministre Sander Lleshaj a exprimé sa « douleur » pour la famille de la victime, mais refuse de démissionner de son poste. Pour le moment, le Premier ministre Edi Rama, d’ordinaire si bavard, n’a pas fait de commentaire. Ces dernières années, la police a régulièrement été accusée d’être utilisée par le gouvernement comme une arme politique.