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COLOMBIE : LA FRANCE COMPLICE

—  @cerveauxnondisponibles

« Les entreprises françaises bénéficient en Colombie d’une excellente image. Outre les actions de fondations d’entreprise françaises sur le plan social, les filiales françaises apparaissent année après année comme le premier employeur étranger en Colombie (environ 100 000 emplois directs). De nombreuses entreprises françaises ont connu de beaux succès en Colombie ». source Site Officiel du Medef

À l’heure où les massacres de la police colombienne et des paras menés par le binôme Uribe/Duque continuent, il nous paraissait important de souligner la complicité de la présence française en Colombie par son silence.

Cette présence c’est plus de 210 entreprises (source chambre du commerce), 130 accords de coopération universitaire, 12 Alliances françaises, des échanges culturels récurrents, une coopération avec la Police française qui ne se cantonnerait pas qu’à la lutte contre le narcotrafic (comme un peu partout dans le monde). La Colombie est le premier bénéficiaire de l’aide publique du développement français sur le continent américain, et donc la France contribue à accroître les inégalités sur place. Dans tous les cas, le silence est accablant alors que la situation dans le pays se dégrade.

En effet : ni les dizaines de morts, ni les centaines de disparus, les milliers de blessés, les militants arrêtés arbitrairement, torturés, violés, frappés ne semblent peser sur la conscience morale des industriels venus faire fortune sur le sol colombien. Aucune condamnation réelle y compris de la part des associations d’échanges universitaires qui semblent peu soucieuses du sort réservé aux étudiants et enseignants colombiens au front pour défendre leurs droits depuis 2019.

Il nous paraît légitime et important de préciser que par le passé, dans presque toute l’Amérique du Sud, la France a participé de manière concrète à aider les dictatures et à la formation des groupes paramilitaires d’extrême droite, invitée à exporter son savoir-faire en matière de contre-révolutions pratiqué durant la guerre d’Indochine et surtout d’Algérie (Opération Phénix) mené par Paul Aussaresses. Sur ce sujet, on pourra citer le documentaire de Marie Monique Robin « Escadrons de la mort, l’école française 24 ». La France était seule à collaborer aussi étroitement avec les USA durant l’Opération Condor, elle avait une présence militaire plus ou moins secrète en Argentine, mais aussi en Colombie, Chili, Brésil et au Vénézuela, d’après Pierre Messmer ministre des armées sous De Gaulle. Dans les années 70, le président Giscard d’Estaing a appuyé les juntes de Videla en Argentine et de Pinochet au Chili. L’héritage diplomatique et industriel paraît assez logique. Nous savons aussi que la police française participe à aider la police colombienne, ici aux côtés de la DEA et du FBI.

** Les entreprises françaises, numéro 1 parmi les étrangères sur le sol colombien **

Nous avons choisi de lister ci-dessous quelques unes des plus grosses entreprises françaises présentes sur le sol colombien, estimant qu’elles se rendent complices des massacres d’état par leur silence :
Groupe Éxito (groupe Casino), Sanofi-Genfar, Axa-Colpatria, Renault-Sofasa, Groupe Seb-Imusa, L’Oréal-Vogue, Teleperformance-Teledatos, Schneider Electric, Sodexo, Lactalis, EDF, Legrand, Veolia, BNP Paribas, Airbus, Nexans, Mersen, April, Vinci, Alcatel, Thalès, Suez, l’Occitane, Saint-Gobain, Natixis, Crédit Agricole, Accorhôtels (gros projet d’investissement en cours), Royal Canin, Servier, Bolloré, Total, Arcelor-Mital, Air Liquide etc.

Vous trouverez aussi dans le lien en commentaire une liste détaillée et un peu plus complète des entreprises françaises recensées sur le sol colombien, classées par secteurs comprenant l’adresse du siège social :

** EXITO, filiale du groupe Casino, main dans la main avec l’ESMAD **

Premier fait établi, une filiale du groupe Casino : Exito a fait des dons à la police anti-émeute ESMAD ( qui correspond à un mélange de ce que sont nos BRAV et CRS). On doit à ces unités de police la responsabilité de nombreux morts, de cas de tortures et d’exactions très graves sur les manifestants.

Dans une vidéo (visible en commentaire), EXITO félicite l’ESMAD et justifie son don félicitant son travail, en présence de Diego Molano (ministre de la défense depuis février 2021). Le représentant d’EXITO, explique que les entreprises privées sont là pour soutenir la force publique. Il remet une carte cadeau de 40 millions de Pesos (plus de 9000euros) au ministre pour les agents et leurs famille qui se seraient battus pour « la démocratie ».

De plus, à Cali, épicentre des révoltes, un supermarché EXITO, aurait peut être servi de centre de détention provisoire où des manifestants auraient été torturés d’après cet article et de nombreux témoignages (le groupe nie). Il aurait fallu 24 heures pour que des représentants de l’exécutif et des défenseurs des droits humains puissent y entrer après ces révélations, de nombreuses informations contradictoires en sortie de commission sont décrites par des parlementaires et n’auraient pas été prises en compte dans le rapport officiel (nettoyage par des produits ménagers, emplacement des traces de sang…).

Le groupe français Casino ne serait-ce que par ce don, participe plus ou moins directement à la répression en cours. On se doute qu’il n’est pas seul, ce pourquoi nous espérons que des journalistes ouvriront des investigations.

Si vous avez des informations vérifiées ou vérifiables sur le rôle de la présence française : n’hésitez pas à nous transmettre tout ce qui concernerait cette porosité ou collaboration avec le régime de Duque/Uribe, mais aussi concernant les blocages ou grèves en cours dans ces entreprises.

Nous ferons de notre mieux pour que l’information circule.

** Que pouvons nous faire ici ? **

Nous ne nous faisons aucune illusion sur le fait que ni la diplomatie, ni les entreprises françaises, ni le gouvernement Macron, ni les organisations politiques ne prendront leurs responsabilités et bougeront le petit doigt à moins d’une très forte pression interne. Tout au plus un appel démagogique au « calme » ou « à calmer les tensions des deux cotés ».

C’est donc aussi sur notre territoire que nous devons appeler à se mobiliser le plus massivement possible pour soutenir les révoltes actuellement en cours, et mobiliser la presse pour qu’elle enquête afin que la France et ses entreprises prennent leurs responsabilités. C’est un devoir non seulement pour le continent américain, mais aussi pour l’ensemble du sud global et donc pour l’avenir du monde.
Après deux ans de mobilisation, le Chili, pays le plus riche d’Amérique latine et l’un des plus à droite va finalement se débarrasser de la constitution mise en place depuis Pinochet, infligeant un sérieux revers au président Pinéra, en sachant qu’une partie des manifestants a pourtant préféré s’abstenir méfiante à l’égard de la démocratie représentative. L’un des terreaux d’expérimentation le plus caricaturales du néo-libéralisme imposé par les USA en tête est donc en train de s’écrouler.

C’est aussi ce qui se joue en Colombie actuellement dont l’influence économique pèse dans de nombreux secteurs économiques de taille : portuaire, numérique, touristique, pétrole et hydrocarbures ou même le narcotrafic. Cinquième pays le plus riche d’Amérique du sud, chasse gardée des USA, prise en tenaille par les paras, l’extrême-droite et les narcos, elle est un exemple concret de tous les travers engendrés par le capitalisme.

L’épicentre révolutionnaire, Cali, n’est pas un symbole mais un exemple à suivre pour tous les révolutionnaires du monde incluant une lutte dans son ensemble : place des minorités, points de blocages, organisation autonome supervisée par les premières lignes, programme de démocratie directe etc.

N’importe quelle victoire remportée par les insurgé-e-s colombiens peut contribuer à l’effet château de cartes à l’échelle d’un continent gangrené par la corruption et par les déstabilisations venues de l’Oncle Sam pour défendre « son » territoire par tous les moyens du soutien à une gauche libérale (Equateur) en allant jusqu’à des coups d’états d’extrême droite échoués ou réussis ces dernières années (Honduras, Venezuela, Bolivie…).

Depuis la France : nous insurgés appelons à soutenir le peuple colombien de toutes les manières possibles.
Nous reviendrons très rapidement sur les événements en cours pour faire un point plus détaillé de la situation sur place avec l’appui de correspondants,

En attendant, toutes nos pensées et tout notre amour révolutionnaire accompagnent les victimes de la répression du régime Duque/Uribe et tou-te-s les manifestant-e-s colombiens.